En 1885, la Conférence de Berlin, convoquée par Bismarck, consacre le partage de l’Afrique entre les puissances européennes. Sans les peuples africains, quatorze nations fixent les règles de la colonisation, imposent leurs frontières et justifient leur domination au nom de la « civilisation ». Le continent est dépecé, son indépendance et son patrimoine durablement bafoués.

Née en 1823, la doctrine Monroe proclame la séparation des mondes européen et américain, mais elle fonde surtout l’expansion et l’hégémonie des États-Unis. D’un petit État né de la rébellion contre l’Empire britannique, l’Amérique se fait empire à son tour : conquêtes, interventions, domination économique, jusqu’à devenir puissance mondiale au XXᵉ siècle.

Au XIXᵉ siècle, sous prétexte de « libre-échange », les puissances impérialistes imposent à la Chine le commerce de l’opium, détruisant son économie et sa souveraineté. L’Angleterre, puis la France, en tirent d’immenses profits, transformant la dépendance d’un peuple en instrument de domination coloniale et en source majeure de revenus pour leurs empires.

En plein été 1953, face à un gouvernement autoritaire voulant reculer l’âge de la retraite et réduire les traitements, les fonctionnaires se soulèvent. En quelques jours, la grève s’étend à des millions de travailleurs. Malgré la répression et les divisions syndicales, le mouvement triomphe : les décrets sont abandonnés. Une victoire historique pour le droit de grève et la dignité des agents publics.

Au tournant du XXᵉ siècle, les cheminots forgent leur unité dans la lutte. Grèves, répressions, conquêtes sociales et solidarité tissent une identité collective puissante. Du combat pour le statut et la nationalisation à la naissance de la SNCF, la voie ferrée devient aussi le chemin de la dignité ouvrière, de la conscience de classe et des vocations militantes.

En 1924, Douarnenez, cœur de la production de sardines, vit au rythme des usines et de la mer. 3000 marins et 2500 ouvriers, dont 1900 femmes, travaillent jusqu'à 15 heures par jour. La solidarité naît de la misère partagée. Le 21 novembre, une grève éclate : 140 travailleurs quittent les ateliers en chantant l'Internationale. Rapidement, 3000 personnes manifestent quotidiennement. Le 1er janvier, des briseurs de grève tirent sur la foule, blessant le maire. Après six semaines, les patrons cèdent : augmentation et majorations sont obtenues. Victoire historique des "Penn Sardin".

En 1896, la Verrerie Ouvrière d’Albi naît de la lutte des verriers de Carmaux, soutenus par Jean Jaurès. Symbole de solidarité ouvrière, cette entreprise autogérée, financée par des dons nationaux, incarne la résistance et l'innovation sociale. Dirigée par les travailleurs, elle prospère jusqu'en 1985, laissant un héritage de coopération et de liberté syndicale. Une leçon d'histoire où l'audace collective défie l'adversité.

"Salut, salut à vous, Braves soldats du 17ème ; Salut, braves pioupious, Chacun vous admire et vous aime. Dans la cuve de la république, préparez le vin de la Révolution sociale !"

Cette citation combine l'hommage aux soldats du 17ème régiment d'infanterie et l'appel à la révolution sociale de Jaurès, illustrant l'esprit de solidarité et de révolte qui a animé cette période historique.

Le Creusot, symbole de la révolution industrielle française, fut marqué par l'essor de la métallurgie et le règne de la famille Schneider. Au 19ème siècle, cette ville industrielle connut des conditions de travail difficiles et un paternalisme strict. Les tensions entre ouvriers et direction culminèrent en 1870 avec une grève majeure pour la gestion de la caisse de secours et de meilleures conditions de travail. Malgré un soutien national et international, la grève fut violemment réprimée, aboutissant à des arrestations et des licenciements massifs. Ce conflit illustre la lutte des classes et la répression des mouvements ouvriers dans l'Europe industrielle.

En 1867, à Paris, le secteur du bronze, employant 6 000 ouvriers, est marqué par une grève historique. Les bronziers, bien organisés et soutenus par la Société des ouvriers en bronze, affrontent les patrons qui tentent de dissoudre leur syndicat. La grève, soutenue par l'Internationale des travailleurs (AIT), dure six semaines et reçoit un soutien financier crucial des travailleurs anglais. Cette solidarité internationale renforce la détermination des grévistes, menant à une victoire significative : une augmentation salariale de 25 % et le maintien de leur syndicat. Ce succès marque un tournant dans l'histoire des luttes ouvrières en Europe, inaugurant une ère de solidarité internationale et transformant l'AIT en un outil de changement social et politique en France.

En 1539, à Lyon, les compagnons imprimeurs, regroupés dans la clandestine « compagnie des Griffarins », déclenchent une grève historique. Face à des patrons voulant réduire leurs acquis, ils revendiquent le maintien du repas commun, une augmentation des salaires et la liberté d'organiser leur temps de travail. Cette grève, marquée par des affrontements et une solidarité ouvrière exemplaire, dure trois mois et s'étend jusqu'à Paris. Malgré la répression royale, les Griffarins résistent, obtenant des concessions en 1540. Leur lutte, qui se poursuit jusqu'en 1571, illustre un antagonisme de classe naissant et préfigure les grèves ouvrières modernes.

Berta Cáceres, militante indigène Lenca du Honduras, a été assassinée en 2016 pour son opposition aux projets miniers et hydroélectriques dévastateurs. Elle défendait les droits territoriaux et environnementaux des peuples autochtones face aux multinationales et à l'État hondurien. Son meurtre illustre les risques encourus par les militants dans ce pays, où la violence et l'impunité règnent.

L'agent orange, un herbicide utilisé par les Britanniques en Malaisie dans les années 1950 et massivement par l'armée américaine au Vietnam de 1961 à 1971, a dévasté la jungle et les récoltes. 80 millions de litres ont été déversés, dont 61 % d'agent orange, fabriqué par Monsanto et Dow Chemical. Contenant de la dioxine, il cause cancers, malformations congénitales et maladies graves, affectant des millions de Vietnamien·nes et d'autres populations. Interdit en 1970, ses effets persistent, touchant encore des enfants aujourd'hui. Aux États-Unis, des vétérans ont été indemnisés, mais les victimes vietnamiennes restent sans compensation malgré des procès. Les épandages ont détruit 20 % des terres agricoles et forêts au sud du Vietnam, un écocide reconnu par l'UNESCO.

ExxonMobil, géant pétrolier, est l'un des plus grands émetteurs de gaz à effet de serre et responsable de marées noires, dont celle de l'Exxon Valdez. Depuis les années 1970, l'entreprise savait que ses activités contribuaient au réchauffement climatique, mais a financé des recherches pour promouvoir la thèse d'un réchauffement naturel et contrer les mesures climatiques. En 2015, des documents internes révèlent qu'ExxonMobil connaissait les impacts climatiques de ses activités dès les années 1970, mais a choisi de les ignorer pour préserver ses profits. La compagnie a activement lutté contre le Protocole de Kyoto et dépensé des millions en lobbying pour bloquer les actions climatiques, illustrant l'incompatibilité entre capitalisme et lutte contre le dérèglement climatique.

Le mouvement Chipko Andolan est né en Inde en réponse à l'exploitation forestière intensive, qui causait inondations et érosion des sols, menaçant les activités traditionnelles des communautés locales. En 1973, les habitants de Mandal empêchent l'abattage d'arbres en les enlaçant, inspirés par une mobilisation ancienne des Bishnoi. Le mouvement, marqué par la non-violence, s'étend rapidement, imposant des lois pour protéger les forêts et un moratoire sur l'abattage. Les femmes jouent un rôle central, défendant les forêts comme source de subsistance et bien-être écologique, et créant des coopératives pour promouvoir des pratiques durables. Leur lutte vise à libérer la société de l'exploitation capitaliste de la nature.

Sous de Gaulle, le nucléaire devient un symbole d'indépendance nationale, avec des expérimentations militaires au Sahara en 1960 et le développement du nucléaire civil à Cadarache et Marcoule. Le choc pétrolier de 1973 renforce cette orientation, malgré une forte contestation. En 1977, une manifestation antinucléaire à Malville contre le surgénérateur Superphénix est violemment réprimée, causant la mort de Vital Michalon. Superphénix, mis en service en 1986, fonctionne peu et est arrêté en 1997. La répression marque durablement le mouvement antinucléaire.

Le chlordécone, insecticide créé en 1952, a été utilisé aux Antilles contre le charançon des bananiers malgré sa toxicité démontrée dès 1963. Interdit aux États-Unis en 1975, il a continué d'être autorisé en France jusqu'en 1990, principalement pour des raisons économiques et coloniales. Ce produit persiste dans les sols et les organismes, augmentant les risques de cancer et affectant le développement des nourrissons. En 2021, l'État français a reconnu certains cancers comme maladies professionnelles, mais les réparations restent insuffisantes. La mobilisation contre l'impunité et pour la dépollution se poursuit.

[...] Dès 1972 le rapport dit Meadows, du nom de ses principaux auteurs, alerte sur les limites de la croissance dans un monde fini. Il avait été commandé par un Groupe de réflexion, le Club de Rome, composé d'industriels, de hauts fonctionnaires, de scientifiques et de chefs d'État qui décelaient des signes de tensions au sein du système, se posaient la question de la durabilité de la croissance. À l’époque, la population mondiale double tous les 32 ans, la production industrielle double tous les 10 ans, la pollution connaît une croissance exponentielle, et le rapport n’aborde pas spécifiquement l’effet des gaz à effet de serre sur le climat qui amplifie leurs conclusions sur bien des points.[...]

[...] C’est un marcheur, un grand voyageur qui va publier plusieurs traités et livres majeurs qui lui assurent une grande renommée dans les milieux intellectuels européens. Être un géographe militant le conduit à avoir une approche globale de la géographie, en établissant des passerelles entre biologie, sociologie, histoire, urbanisme et environnement. Cela fait de lui un précurseur de la géographie sociale, de la géographie politique, de la géohistoire et de l’écologie, même s’il n’utilise jamais ces termes. En harmonie avec sa conception de la nature, il est un strict végétarien, un « légumiste », et naturiste.[...]

[...] La plus significative des révoltes écologiques est celle des mines de cuivre dans le village de Rio Tinto en Andalousie. Les premières plaintes avaient commencé dès 1840 contre les procédés de traitement du cuivre qui détruisaient la végétation. L’introduction d’équipements lourds avec l’arrivée de capitaux britanniques met la pollution à un niveau insupportable. Le raffinage séparant le cuivre et le soufre se fait par brûlage en combustion lente à ciel ouvert des tas de pyrite de fer, qui produit des nuages sulfureux et de l’acide sulfurique qui dévastent l’agriculture à des kilomètres autour du lieu de production. Il était difficile de respirer à certains moments, des personnes mouraient, des centaines d’autres souffraient de convulsions.[...]