On ne naît pas congolais-e, on le devient ?
Sur le papier, en effet je ne suis pas née congolaise. J'aurais pu naître ivoirienne, je suis née à Abidjan, ou guinéenne où j'ai passé ma petite enfance, ou même belge, pays que je connais par coeur du fait de liens familiaux très forts, et pourtant je suis née en étant française. Parce que mes deux parents l'étaient à ma naissance, bien qu'ils soient tous les deux nés au Congo Brazzaville, là où ils ont aussi grandi et où presque toutes leurs familles respectives sont établis depuis des siècles et sont installées aujourd'hui encore.
Sur le papier toujours, je suis devenue congolaise en 2009, par une décision du consulat du Congo qui m'a accordé la nationalité par le droit du sang dont bénéficie tous les descendants de congolais-es où qu'ils soient dans le monde.
Sur le papier encore, je suis devenue congolaise le vendredi 8 juin 2018 car c'est le jour où l'agent administratif m'a tendu ma carte d'identité congolaise.
Ce jour-là, au téléphone mon père m'a dit "ma fille tu es même plus congolaise
que moi". Car mon père, comme sûrement des centaines de milliers de congolais du territoire ou de la diaspora, n'ont pas ou plus de pièce d'identité qui attestent de leur appartenance à la nation congolaise.
Mais l'appartenance à la nation, ne peut pas juste se résumer à un bout de papier. C'est plus que ça non ?
Ce jour-là et au cours de mon voyage je me suis questionnée sur ce qui faisait de moi, avant ce vendredi 8 juin 2018, une congolaise. Finalement ça tenait à peu de choses : les références musicales, que je chantais dans le taxi (ce qui avait le don d'étonner tout le monde "elle chante en lingala mais elle ne comprend pas ce qu'elle dit"), culinaires (donnez moi du saka et du riz et je vous laisserai tranquille pendant une heure), le sens de l'humour & la décontraction bien connu des Congolais-es, etc...
Alors c'est vrai, je ne maitrise pas la langue, mais j'apprends. Je ne connais pas très bien l'histoire (moins récente) du Congo, mais j'apprends. Je parle "comme une Française", mais c'est aussi ce que je suis, donc je le vis très bien.
Je ne suis pas née congolaise, je le suis devenue, et je le resterai.
Références musicales :
- « Mokolo Nakokufa » de Tabu Ley Rochereau (1966) chez Syllart Records
- « Zebola » des Tambours de Brazzaville (2012) chez Believe SAS
- « Jusqu'à la Gare » de Daphné (2017) chez Stevens Music Entertainment
- « La Congolaise » de Jacques Tondra et Georges Kibanghi (paroles), et
Jean Royer et Joseph Spadilière (musique) (1959)
Je ne détiens les droits d'aucun de ces morceaux.
Cités dans l'épisode :
- Brazzaville - Le quartier de Ouenzé - Le royaume têké - Le lingala
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