
Ce que je vais vous raconter ne se chuchote pas. Ne se hurle pas. Je veux vous raconter comment en silence, nous tombons. Un liquide froid glisse entre mes mains. Je le réchauffe avec mes mots, avec ma voix. Je le réveille. Je m’y baigne pour le rendre vivant. Que la température s’ajuste. Sans choc thermique, cette fois.
Je vais vous raconter les morts et les vivants du quotidien. Notre peau tannée au fil des jours, qui soudain se fissure. La chair qui parle avant la voix. Le bleu qui devient profond autour de soi et en soi, après la décoloration.
Je vais vous raconter l’anesthésie, le somnambulisme, la douleur et le réveil brutal, à la vie. La vie fulgurante qui fait bouillir le sang. Tout cela en silence. Invisible. Si l’on n’y prête pas attention.
Je vais vous raconter la chute, le sol dur et les muscles tendus à nouveau.
Se relever, sensible. Laisser les boulons, le métal et l’indifférence à terre.
Je prends mes fils, parfois serrés, parfois lâches, et je tisse de mes mots cette histoire qui déjà m’échappe pour rejoindre le monde.
Voilà, je pose ici ma voix, au milieu des vôtres.