Extrait de Histoires du soir, un livre de Benoît Broyart illustrépar Laurent Richard, en vente dans La Librairie de Benoît :
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Tout le pays est inquiet. Voici des mois que le trône de Bretagneest inoccupé. Ça ne peut plus durer. Un trône sans roi, çan’existe pas.
Il est temps. Merlin, le magicien, l’a décidé. Avant la fin de lajournée, le problème sera résolu. Il a tout prévu.
Au milieu d’une clairière, Merlin a planté une énorme épéedans la pierre. Et sur la lame de cette dernière, on peut lire :« Celui qui parviendra à m’arracher d’ici sera le roi ».
Accompagné du jeune Arthur, devenu son assistant depuis qu’il l’aadopté, Merlin accueille tous les chevaliers du pays. Ils sepressent par dizaines, tous persuadés qu’ils sauront relever ledéfi.
Merlin s’avance et dit :
– Messires, vous passerez un par un. Excalibur est une épéemagique. Elle saura lire dans vos cœurs et seul le plus braved’entre vous réussira cette épreuve.
Arthur est impressionné. Il aimerait essayer lui aussi mais iln’osera jamais. Il est bien trop petit. Thibault, le premierchevalier, le bouscule et ne manque pas de lui rappeler.
– Écarte-toi de mon chemin, gamin. Je suis le plus fort duroyaume.
Thibault saisit l’épée et commence à tirer. Il grogne, il crie,il rugit en contractant tous ses muscles… Mais Excalibur refuse debouger. Le chevalier abandonne, dépité.
Arthur se tourne vers Merlin :
– La force et la bravoure sont-elles deux choses différentes ?
Merlin sourit et répond :
– Absolument.
Jofroi, le deuxième chevalier s’avance. Il a deux outils avec lui.Un marteau et un burin. Arthur le regarde s’approcher de la pierre,étonné.
– Je serai bientôt le roi car je suis le plus malin.
Sous le regard amusé de Merlin, le chevalier frappe la pierre. Ilespère dégager la lame en creusant. Arthur retient son souffle.Est-ce le nouveau roi de Bretagne ? Le socle tient bon et lechevalier se décourage. Excalibur n’a pas bougé. La pierre n’estmême pas éraflée.
Arthur se tourne vers Merlin :
– Il est malin mais il n’est pas brave.
Merlin sourit et répond :
– Exactement.
Tout au long de la journée, les chevaliers se succèdent. Ilsemploient toutes les méthodes possibles. La force. La ruse.L’inventivité. Rien n’y fait. Excalibur ne bouge pas.
Le soleil va bientôt disparaître. Arthur est inquiet. Si Merlins’était trompé ? Il avait promis un roi aujourd’hui etpour monter sur le trône, il n’y a plus personne.
Merlin se tourne alors vers Arthur, un sourire aux lèvres :
– J’en suis certain, mon jeune ami. Excalibur est formelle. Leplus brave est dans cette clairière.
Arthur regarde autour de lui. Mais où se cache le nouveau roi deBretagne ? Merlin pose la main sur l’épaule de son protégé:
– Voudrais-tu essayer ?
Arthur regarde le magicien avec de grands yeux, étonné. Merlininsiste.
– N’es-tu pas brave ?
Le jeune garçon se sent alors pousser des ailes. Et pourquoi pas ?Si Merlin lui donne sa chance, Arthur doit la saisir.
Dans la clairière, les chevaliers froncent les sourcils. Cefreluquet, le nouveau roi de Bretagne ? Merlin a le sens del’humour.
Arthur marche droit, sans trembler. Il grimpe sur la pierre et saisitExcalibur. Il ferme les yeux pour se concentrer.
Sous le regard sévère de Merlin, les chevaliers se retiennent pourne pas rigoler.
Et l’incroyable arrive. Excalibur se laisse faire et quitte sapierre. Arthur ouvre les yeux et sourit. Médusés, les chevaliersapplaudissent d’abord timidement,. Et dix minutes plus tard, ilsportent le jeune garçon en triomphe et crient « Vive leroi ! »...
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Mario est le meilleur clown du cirque Plouf. Quand il entre sur lapiste, tous les enfants rigolent. Chaussures énormes. Grandpantalon. Chapeau haut-de-forme. Nez rouge et rond. À chaque foisqu’il s’élance, tous les enfants crient de bonheur.
Mais aujourd’hui, rien ne va plus. Dans sa loge, au lieu de semaquiller, Mario n’arrête pas de pleurer.
Hier, pendant son numéro, un enfant a crié. Il a hurlé de peur. Unenfant qui ne rigole pas, passe encore. Mais un petit garçonterrorisé qui s’enfuit, entraînant son père désolé avec lui,c’est pire que tout. Un clown qui fait peur, quelle horreur !
La prochaine représentation commence dans trois heures. Tous lesbillets sont vendus. Et sans le meilleur clown du cirque Plouf, pasde succès.
Magda, la trapéziste, s’approche de son ami pour le consoler.
Ce n’est pas grave, Mario.
Pas grave ? J’ai fait peur à un enfant. Ma carrière est brisée.
Mario ne veut rien savoir. Retrouver le petit peureux et l’entendre.Lui présenter ses excuses et comprendre. C’est la seule solution.Autrement, le clown ne jouera pas. Mario se souvient parfaitement duvisage de l’enfant. Il a même dessiné un portrait ressemblant.
Un quart d’heure plus tard, Mario est au milieu de la grande place.Perché sur un escabeau, son dessin à la main, il donne de la voixpour attirer les passants.
– Mesdames et messieurs, reconnaissez-vous cet enfant ?
Intrigués, attirés, les curieux s’approchent. On entend des voixà droite, à gauche, au milieu, en haut, en bas. Des voix un peupartout. Des voix qui disent tout et n’importe quoi.
Jamais vu celui-là.
Ce ne serait pas, des fois, le petit Roussel ?
Maman, dis, pourquoi il crie comme ça, le monsieur ?
Non mais tu sais bien, le fils de madame Arcadie.
Sans se lasser, Mario n’arrête pas de répéter.
– Mesdames et messieurs, savez-vous où je peux trouver ce garçon ?Une récompense pour tout renseignement sérieux. Deux places auxpremières loges pour le cirque Plouf.
On entend d’autres voix. À gauche, à droite, au milieu, en bas,en haut. Des voix un peu partout. Des voix mélangées. Des voix quidisent tout et n’importe quoi.
Ce ne serait pas, des fois, enfin tu sais bien, comment ils’appelle déjà ? Le petit-là. Non mais tu sais. Avec lestâches de rousseur. Il habite juste à côté. Ce n’est pascompliqué. Ah, son nom m’échappe. Comment déjà ?
Au bout d’une heure passée sur son escabeau, Mario est au bord deslarmes. Il a échoué. Sa carrière est fichue. Il va changer demétier. Le clown observe la grande place qui commence à se vider.
Mais derrière lui, un petit garçon s’avance sans bruit. Il seplante en bas de l’escabeau et lève les yeux.
– Monsieur, c’est moi que vous cherchez ?
Mario a sursauté, surpris. Il a eu peur et a failli tomber. Il setourne et regarde le petit garçon, soulagé. Le peureux, c’estbien lui. Il le reconnaît. Sauvé ! Le clown descend doucement.
– C’est mon copain Arthur qui m’a dit que vous me cherchiez.
L’enfant regarde le portrait que Mario tient dans la main.
– Vous dessinez bien, monsieur. Le portrait, vous pouvez me ledonner ? Je vous reconnais. Vous travaillez au cirque. Super,votre numéro. Je m’appelle Mathias, enchanté.
Mario ouvre grand les yeux, étonné. Mathias continue de parler.
– Désolé. Hier, on a dû partir pendant le spectacle. Le portablede papa a sonné. J’ai crié parce que je voulais rester mais rienà faire. Comme dit mon père, les affaires sont les affaires.
Mario vient de comprendre. Il s’est trompé. Un grand sourire auxlèvres, il tend deux billets à Mathias.
– Puisque le spectacle t’a plu, voici des places aux premièresloges pour ce soir. Cette fois, demande juste à ton papa d’éteindreson portable, s’il te plaît.
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C’est la fête à Bull-City. Le shérif remettra aujourd’hui leprix du meilleur enfant cavalier.
Toute la famille de Calamity est rassemblée autour de la table. Samère, son père, Johnny et Teddy, mais aussi Mary, Cherry et Lydie.
Les chevaux passionnent leur grande sœur depuis des années. Omerbascule encore au salon. Il fait le bonheur des plus petits depuisque Calamity galope en vrai.
Son père regarde souvent le vieux jouet.
– Tu passais tes journées dessus. Impossible de te faire descendresans que tu piques une colère.
Calamity enfile ses bottes, met son chapeau et se tourne vers lereste de la maisonnée.
– L’heure a sonné, en route !
Dans la rue, la famille marche au complet. Calamity en tête, suiviepar Johnny et Teddy, mais aussi Mary, Cherry et Lydie. Elle tientTabasco, son cheval, par la bride.
Tous les curieux sont sortis. Le passage de Calamity fait grandbruit. Et l’épicier et sa femme ne sont pas du même avis.
– Margaret, la place d’une fille n’est pas sur un cheval.
– Et moi Henry, je dis que si. Retourne à tes haricots au lieu dedire des âneries !
Décorations colorées, foule impatiente. Au centre de Bull-city,tout est prêt pour accueillir les concurrents. Dix enfants sontinscrits. Et Calamity est la seule fille de la liste.
Le shérif s’avance et dit.
– Pour connaître les deux meilleurs cavaliers, qui passerontensuite l’épreuve du chapeau, place à la course de chevaux.
Les candidats sont alignés. Jack est parmi eux. C’est le plushorrible macho de Bull-City. Les filles, il veut les réduire enbouillie. Il fixe Calamity avec son air ahuri.
– Ce n’est pas une femmelette qui va me distancer, tu sais.
Le départ est donné et les chevaux lancés. Tabasco fonce têtebaissée et Calamity arrive la première sans difficulté. Ellefranchit la ligne en criant.
– Yeeep Yeeep Yepiiii !
Jack est éliminé. Démonté, décomposé, il saute à pieds jointssur son chapeau pour se calmer. Mais rien n’y fait. Il finit parpleurer.
– Ouuinnn ! Je ne m’en remettrai jamais. Calamity, jevoulais en faire de la chair à pâté !
Les deux meilleurs cavaliers vont s’affronter. Mais ramasser unchapeau quand on file au galop, ce n’est pas facile. Calamitycommence à douter. Elle doute plus encore quand elle voit le visagede son adversaire. John, son meilleur ami, est arrivé deuxième. Etsavoir que ce sera elle ou lui pose problème à Calamity.
Sur la ligne de départ, Calamity se tourne vers lui.
– Je n’ai aucune envie de gagner contre toi. Combattre un ami,très peu pour moi, cow-boy !
John lui sourit.
– Si tu gagnes, je ne t’en voudrais pas. Mais ce n’est pas sûr.L’épreuve du chapeau est une de mes spécialités.
Le départ est donné et les chevaux lancés. Tabasco fonce têtebaissée. Calamity passe devant John, John passe devant Calamity…Rien n’est joué. La foule retient son souffle. Les cavaliersapprochent de leur cible et l’écart se réduit.
Le chapeau est à deux mètres des chevaux. Calamity et John sepenchent au même instant pour attraper le trophée.
C’est la fête à Bull-City. La foule pousse de grands cris. Qui agagné ? Mais qui ?
Sur la ligne d’arrivée, les deux jeunes cavaliers rient sanspouvoir s’arrêter. Ils tiennent chacun dans une main la moitié duchapeau déchiré.
Le rire gagne bientôt l’assemblée et les champions sont acclamés.Calamity sourit, sa famille aussi. Son père, sa mère, Johnny etTeddy, mais aussi Mary, Cherry et Lydie.
Quel bonheur de partager cette belle victoire avec son meilleur ami !Moitié-moitié, fifty-fifty.
– Yeeep Yeeep Yepiiii !
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Taille-Barbe collectionne les trésors. Les pièces, les bagues, lescolliers en or… Il est toujours prêt à piller et à amasser.Bientôt, il sera le pirate le plus riche du monde. C’est un hommetrès puissant, craint et respecté par tous ses confrères. Seul,Aldebert, son fils, ne se réjouit pas de sa réussite. Être le filsde la terreur des Caraïbes, c’est un vrai calvaire ! Devant Taille-Barbe, Aldebert laisse exploser sa colère : « Comment veux-tu que je sois fier d’être le fils du plus méchantde la Terre ? Tu pourrais être pêcheur ou explorateur, mais tupréfères passer tes journées à faire des prisonniers. Tout çapour quoi ? Pour remplir d’or un bateau déjà plein à rasbord ! Ça ne peut plus continuer. Je veux que tu changes demétier ! »
En entendant ces mots, Taille-Barbe hésite entre punir son fils ou éclater de rire. Il se contente de hausser les épaules :
« Écoute, moussaillon, retourne jouer aux osselets et laisse-moitravailler… Je suis trop vieux pour changer de métier. » Sur le pont, les pirates se préparent pour la prochaine attaque.Taille-Barbe supervise les manœuvres : « Aiguisez vos sabres, marins ! Hissez haut le drapeaunoir, matelots. » Aldebert aussi a décidé de passer à l’attaque. Son père ne veutpas l’écouter ? Tant pis. Il est prêt à employer les grandsmoyens pour le faire changer d’avis. Pendant que l’équipages’agite, Aldebert se faufile dans la cale. Il connaît par cœur lebateau et ses points faibles. Armé d’un lourd maillet, il frappela coque à grands coups réguliers. Elle ne met pas très longtempsà céder. Aldebert remonte sur le pont, et court vers Hachemenu, un des piratesde l’équipage :
« J’ai vu de l’eau dans la cale ! Il y a un troudans la coque ! On coule !!! – Quoi ? C’est une plaisanterie, petit ? grogneHachemenu. Mais non… Le moustique a raison… Sauve qui peut, oncoule ! ». Sur le pont, les redoutables pirates s’affolent. Car, Taille-Barbeexcepté, sur le bateau, personne ne sait nager. C’est la panique àbord ! En bon capitaine, Taille-Barbe garde son sang-froid et rassurel’équipage :
« Matelots, restez calmes, je vais organiser l’opération desauvetage. Vous voyez cette île ? Elle n’est pas trèsloin, nous pouvons nous y réfugier. Je sais que vous ne savez pasnager. Videz tous les tonneaux et accrochez-les aux chaloupes. Ilsvous serviront d’embarcations de fortune. Aldebert, accroche-toisur mon dos. Nous quittons le navire. »
Les consignes de Taille-Barbe sont appliquées à la lettre.L’équipage s’entasse dans les chaloupes et les tonneaux. Lesembarcations tanguent, parce que les pirates n’ont pu se résoudreà abandonner leurs trésors. Mais ils rament vaillamment sous lesencouragements de Taille-Barbe et le rivage se rapproche.
Sain et sauf sur la plage, les pirates regardent leur navire couler àl’horizon. « Jamais je n’aurais cru qu’un tel bateau prendrait l’eau,soupire Taille-Barbe.
– C’est ma faute, Papa, dit Aldebert. J’ai fait un trou dans lacoque. Sans bateau, je pensais que tu serais bien obligé de changerde métier… – Crénom de nom, mon garçon, tu mériterais une bonne leçon,mais je n’ai pas de temps à perdre, s’exclame Taille-Barbe.Puis, il ajoute en se retournant vers l’équipage : Foi depirate, nous allons construire un nouveau bateau et nous repartirons,matelots !
Les pirates regardent leurs pieds, un peu gênés. Hachemenu s’avance : « On vous suivra les yeux fermés, Capitaine, mais pas avantd’avoir appris à nager ! »...
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Taratata taratata pouet klong. Comme tous les matins, le trompette est en haut de la plus haute tour du château. Il annonce le début de la journée. Et comme chaque fois, c'est la catastrophe. Taratata taratata pouet klong. Il joue faux et tout s’arrête au château. Gimini et ses amis se bouchent les oreilles. Le roi aussi.
Depuis tout petit, Gimini répète à sa mère.
– Un jour, je serai le trompette du royaume. J'irai en haut de la plus haute tour du château pour annoncer le lever du soleil. Et je préviendrai aussi notre souverain de l'arrivée des ennemis.
Au royaume de Mélomanie, le roi reçoit souvent des saltimbanques. Le château se remplit de sons d’instruments aux noms compliqués et aux formes bizarres. Vielle, cistre, luth, lyre. Gimini est toujours aux premières loges. Il adore la musique.
La maman de Gimini sait que son garçon ferait le meilleur trompette du royaume. Il est encore jeune mais il connaît déjà son instrumentsur le bout des doigts. Depuis tout petit, il s'entraîne chaque jour.
Ce matin, Gimini s'est levé avant le soleil. En secret, il s'est glisséen haut de la plus haute tour du château. Aujourd'hui, c'est lui qui réveillera les sujets du roi. Taratata taratata taratataaaa.
En arrivant en haut de la plus haute tour du château, le roi découvre Gimini. Il continue d'écouter le jeune trompette jouer une bonne partie de la journée. C'est décidé. Les fausses notes, c'est terminé. Ce garçon sera le nouveau trompette du royaume. Gimini possède un drôle de pouvoir. Lorsque le roi entend sescompositions, il en oublie même de s'entraîner pour le combat.
Les conseillers du roi sont très inquiets.
– Cet enfant est un fléau. Le royaume court à sa perte si notre roi ne s’intéresse plus à la guerre.
Quelques jours plus tard, l’ennemi approche. Gimini sort son instrument et souffle pour prévenir le roi de l’arrivée du danger.
Derrière les meurtrières, les soldats tendent leurs arcs. Ils sont prêts à tirer.
Mais ils découvrent bientôt l'armée ennemie assise sagement de l'autre côté des douves. Tous ont déposé leurs armes pour acclamer Gimini, le plus grand musicien du royaume.
Le son du jeune garçon est à la fois doux et chaud. Les notes tombent toujours au bon endroit.
Depuis cette incroyable journée, on vient de loin pour assister aux concerts que Gimini donne chaque semaine. Les soldats arrivent de partout sans leurs armes et s’assoient calmement en cercle, derrière les douves.
Personne, au royaume de Mélomanie, ne trouve plus de temps pour la guerre. Il y a mieux à faire. S’asseoir et écouter les jolies compositions du plus jeune trompette de la terre.
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Astro ne sort jamais du palais. Dans son grand vaisseau, il y a toutce qu’il faut. Des couloirs pour courir, des coins pour se cacher.Mais ce que la princesse préfère, c’est lire sur son fauteuilétoilé ou siroter sur le canapé des cocktails qui piquent lalangue. Parfois, elle fait les deux à la fois.
Quand elle lit, Astro voyage. Elle en connaît un rayon sur lesaventurières de l’espace en général et sur Nogora enparticulier.
Perdue près de la planète Citron, Nogora avance à fond, àcheval sur son cyclon à propulsion. Sa mission : exterminer leterrible Rouflacaisse et sa bande de neutrons.
Astro dévore une par une les pages de son gros livre. C’est commesi elle y était. La princesse sait qu’elle aussi, un jour,remplira une mission incroyable. Quand elle sera grande. Grande, ellel’est déjà un peu. D’ailleurs, elle le rappelle souvent à sesparents qui l’oublient… trop souvent.
– Je suis grande maintenant !
Elle l’est un peu… mais pas assez. Pourtant, un jour viendra oùl’on tremblera de la savoir dans une galaxie lointaine, face à descréatures à sept jambes, trois bouches et au moins huit bras.
En attendant, Astro voyage dans son fauteuil. Pour ses parents, c’estrassurant. Il lui arrive de relever la tête et de s’approcher deshublots. Pas plus. Elle regarde les planètes passer. Les planèteset les vaisseaux. Elle voit les étoiles briller et continue derêver.
Depuis quelque temps, l’espace est devenu une vraie fourmilière.Le roi s’en désespère. Les vaisseaux sont trop nombreux. Ils vonttrop vite. Et tout le monde voyage seul dans d’énormes soucoupes.Résultat, les accidents arrivent tout le temps. Et sous cette pluiede vaisseaux spatiaux, Astro serait réduite en purée si ellesortait.
– Ma chérie, tant que je n’aurai pas trouvé de solution pourarranger la situation, tu resteras à la maison.
– Pas de problème, papa. Mais chut, s’il te plaît. Je voudraisterminer ma page avant le repas.
Astro est sage. Un peu trop même. Le roi et la reine commencent às’inquiéter. Ils ont peur qu’elle s’ennuie.
– Auguste, c’est une enfant. Elle a besoin de courir, de sedépenser. Un jour, tu verras, elle s’ennuiera et aura envie desortir.
– Envie de sortir ? Ne me parle pas de malheur !
– Remarque, j’ai peut-être la solution. Et si on lui offrait uncleptodon ?
Les cleptodons sont de petits êtres qui adorent les enfants. Ilsjouent à longueur de journée et possèdent des bras qui n’enfinissent pas. C’est pratique pour attraper les jouets en haut desétagères.
Lilo est arrivé ce matin dans un joli paquet.
– Astro, nous avons pensé avec maman que cela te plairait de fairela connaissance de Lilo.
La princesse lève le nez de son livre et regarde ses parents ensouriant.
– Un cleptodon, quelle bonne idée ! Merci ! Enfant,Nogora en avait un. Ça, c’est écrit dans le tome 1.
Lilo, douze kilos. Aussitôt arrivé, aussitôt adopté. Les parentsde la princesse sont rassurés. Astro ne s’ennuiera pas.
Mais ce que le roi et la reine ignorent, c’est que les cleptodonsaiment caresser les étoiles. C’est même leur activité préférée.Malheureusement, la notice qui accompagnait le colis a dû glisser enroute et s’est perdue dans l’espace.
Voilà pourquoi ce matin, quand Astro se réveille, elle découvreson compagnon le nez collé au hublot de la chambre. Les cleptodonsne parlent pas mais les grands yeux de Lilo sont pleins de larmes.
– Qu’est-ce qui ne va pas ? Ne me dis pas que tu aimeraissortir ? C’est dangereux. Dans notre galaxie, il y a trop decirculation. Comme dit mon père, c’est une vraie fourmilière...
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Louis met sa blouse et traverse la librairie pour vérifier que tout est à sa place, que rien ne dépasse. Le désordre et le bruit sont ses deux grandes terreurs. Quand des enfants entrent ici, les piles de livres chancellent, vacillent, chavirent, sombrent. Les livres s’effondrent, s’écroulent, tombent. Ça finit toujours mal. Un désastre. Tout est déclassé, déplacé.
Ce matin, sa sœur Magali surgit, tenant Aurélien par la main.Aurélien... et deux de ses copains.
– Je n’ai personne pour les garder. J’en ai pour une heure. Pas plus. Voici Bastien et Firmin. Ils se mettront dans un petit coin et tu ne les entendras pas.
Louis pâlit, blêmit, frémit et Magali poursuit.
– Merci, tu es trop gentil. Je suis sûre que ça se passera bien.
La porte du magasin claque. Le libraire est seul avec Aurélien et ses copains. Six ans et une vingtaine de dents chacun.
Des enfants, ça a besoin d’espace. Sinon, c’est la catastrophe. Le libraire voit déjà les livres tomber. Ils seront abîmés, cornés.
– Installez-vous dans la réserve, les garçons. Et surtout, pas un bruit.
Les trois enfants filent dans l’arrière-boutique. La pièce estminuscule. Bastien et Firmin regardent par-dessus l’épauled’Aurélien qui tient sa console à deux mains.
– Aurélien, tu me la prêtes. Tu me la prêtes ?
– Attends. Je finis le niveau. Je suis arrivé au château.
– Ouimais tu avais dit… Bon, si c’est ça, je rentre chez moi !
En courant dans la boutique, Firmin renverse une pile de livres. Louis se précipite pour la ramasser. Trois secondes plus tard, l’enfant est dans la rue. Dehors, quelle horreur ! Dehors, les voitures bourdonnent, bouchonnent, klaxonnent et les trottoirs sont sales. Le libraire n’a pas le choix. Il sort en se bouchant le nez, slalome entre les papiers et les crottes et rattrape Firmin de justesse.
– Viens ici, tu vas te faire écraser.
En revenant dans la librairie, Louis trouve deux jeunes chevaliers en train de se battre. Bastien se protège avec un livre d’art. Aurélien s’est fait un casque avec un livre de poche. Cetteboutique n’est pas un champ de bataille.
– Vous vous croyez où ? À partir de maintenant, vous ne bougez plus. C’est compris.
Les enfants font les statues pendant que le libraire entame un tour complet du magasin. Il inspecte, ramasse, remet en place, reclasse.
– Tonton, si tu nous lisais une histoire ? Ça nous occuperait.
– Une histoire… Et puis quoi encore ! Je n’ai pas que ça àfaire. J’ai des clients.
Les enfants regardent autour d’eux, étonnés.
– Où ça ?
Louis fait la grimace. C’est vrai, sa librairie est en train de coulercomme un bateau troué. Les clients disparaissent, avalés par unaspirateur géant. Tout le monde file acheter ses livres àl’hypermarché. C’est l’hyper, le coupable. L’aspirateur àclients surgonflé.
Une histoire. Finalement, pourquoi pas. Mais devant cette soixantaine de dents alignées, Louis se demande s’il sera à la hauteur. Il attrape un recueil de contes, fait asseoir les enfants devant lui etse lance.
– Il était une fois, un vieux roi qui habitait un château…
La voix de Louis est lente. Aurélien s’ennuie. Il se tortille. Surune fesse. Sur l’autre. Il bâille et se lève bientôt. Lelibraire garde le nez dans son livre, imperturbable.
Aurélien escalade la face nord de la librairie. Sans échelle. Première étagère. Deuxième. Quatrième. Huitième. Il est presque à hauteur du plafond et va redescendre par la face sud, beaucoup plus dangereuse, quand son pied accroche une longue rangée de livres qui tombe sur la tête de son oncle. Catastrophe ! Le libraire, couché par terre, ne bouge plus...
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Dans l’arène, Manolo attend son taureau. Un vrai, un costaud, avecun gros anneau piqué dans les naseaux. Un taureau bien énervé quifoncera sur lui tête baissée. Manolo n’a pas peur. Il fait untour de piste dans son costume doré, la tête haute. Le publicencourage le torero en tapant dans ses mains. Le spectacle peutcommencer.
Mais le taureau refuse de sortir. Manolo approche. Un pas. Deux puistrois. Le public attend. Le torero agite bientôt sa muleta devant lacage ouverte. Sans résultat. Le taureau lève sa tête pleined’ennui. Il regarde Manolo. Maintenant, le torero tape du pied parterre.
– Olé ! Olé !
La bête ne bouge pas. Manolo frappe les grosses fesses de l’animalavec sa muleta. Sans succès.
La corrida est annulée. Dans un coin de l’arène, Manolo retientses larmes. Un taureau qui ne veut pas se battre, quelle honte !Déshonoré, le toréro se bouche les oreilles pour ne pas entendrele public en colère.
Un taureau ne peut pas être un ramollo ! Le lendemain, Manoloappelle le vétérinaire pour qu’il vienne ausculter l’animal. Iltrouvera sûrement une solution. Et bientôt, le torero reviendradans l’arène.
Le vétérinaire sort des lunettes de sa mallette. Il les pose sur legros museau.
– J’ai connu un taureau myope.
Manolo saute d’un pied sur l’autre devant l’animal pourl’exciter.
– Olé ! Olé !
Le taureau lève sa tête pleine d’ennui. Il sourit derrière seslunettes. Manolo enrage.
– Qu’est-ce que je vais faire de toi ?
Le vétérinaire se gratte la barbe. Il prend une seringue dans samallette.
– J’ai trouvé. Votre taureau manque de vitamines. Avec cettepiqûre, tout va rentrer dans l’ordre.
Manolo, soulagé, attrape sa muleta.
– Alors taureau, cette fois, tu viens te battre ! Hein, tuviens te battre !
L’animal lève sa tête pleine d’ennui. Il sourit. Le vétérinaireregarde Manolo en soupirant.
– Désolé. Là, je ne peux rien pour vous. C’est un taureaupacifique. Il n’aime pas la bagarre. La violence l’ennuie.
De rage, Manolo piétine sa muleta.
Manolo est désespéré. Tout est fichu. Mais soudain, un grand bruitretentit derrière lui. Un bruit de sabots. Un bruit de taureau augalop. Le torero n’en croit pas ses yeux. L’animal a rejoint ungroupe d’enfants qui jouent au foot. Il attrape leur ballon entreses cornes et le pose devant Manolo. Le taureau lève la tête etsourit. Manolo renvoie le ballon vers les enfants. Et l’animal faitmieux encore. Il dribble les joueurs puis shoote. Un taureau commeça, on n’a jamais vu ça.
C’est sûr, cet animal n’aime pas la bagarre. Mais quel grandsportif ! À la fin de la journée, les enfants rentrent chezeux. Manolo s’assoit à côté du taureau. Il a soudain une idée.Une grande idée. Pour tous les deux, en tout cas, fini la corrida.
Deux semaines plus tard, à l’entrée de l’arène, Manoloinstalle un petit écriteau. On peut lire : Unique au monde !Un taureau footballeur. Spectacle à 16 heures.
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Trop c’est trop. La princesse Mélisse en a assez. Tout l’ennuiedans ce royaume. Aucun nuage. Température idéale. Ça ne peut plusdurer.
Mélisse aime avoir peur. Chaque soir, dans sa chambre, elle lit deshistoires qui fichent la trouille. Mélisse aime avoir peur. Et si leroi Isidore ne lui file pas les chocottes, demain elle prend laporte.
Au petit déjeuner, Mélisse dit à son père :
– Papa, je m’ennuie. J’en ai assez. Ma valise est prête. Et situ ne me fais pas peur, je pars travailler au musée de l’horreur.
– Le musée de l’horreur ? Ma chérie, une princesse n’estpas obligée de travailler. Tu n’es pas bien ici ?
– Papa, je veux une peur bleue. Pas un ciel bleu.
Le roi Isidore est désespéré. Perdre sa fille, jamais ! Ilréunit ses conseillers et leur dit :
– Mélisse s’ennuie au château. Elle veut une peur bleue.
Dans la salle, c’est le silence complet. La tête entre les mains,les conseillers cherchent la solution.
Une peur bleue, qu’est-ce que c’est ? Un ciel bleu, tout lemonde sait. Mais une peur bleue, aucune idée.
Alfred, le premier conseiller, se lève et dit :
– Une peur bleue, ça n’existe pas.
Le roi retient ses larmes.
Guillaume, le deuxième conseiller, se lève et dit :
– Une peur bleue, on n’a jamais vu ça !
Jofroi, son plus vieux conseiller, tord son dos et déforme sa boucheédentée. Il tire la langue et enfonce deux doigts dans ses trous denez. Il se lève d’un bond et se met à hurler.
– Waaaaaaaaaaaaaaaaaaargh !
Le roi claque des dents, terrifié. Il a les chocottes. Alfred etGuillaume tombent à la renverse. On ne voit plus que leurs pieds.
Jofroi sourit et dit :
– Une peur bleue, c’est ça ! Croyez-moi, après cettefrousse, Mélisse ne fera plus de caprice.
Le roi Isidore est soulagé.
– Jofroi, va ce soir dans sa chambre et donne-lui la peur bleuequ’elle réclame.
Mélisse a attendu toute la journée. Rien ne s’est passé. Demain,elle partira au musée de l’horreur pour travailler.
Sur son lit, elle ouvre un livre qui fiche la trouille. Une histoirede monstre qui dévore les enfants. À chaque page, Mélisse claquedes dents.
Dans le couloir, Jofroi avance sur la pointe des pieds, suivi par leroi. Le conseiller déforme sa bouche édentée. Avec ses doigts, ilétire ses trous de nez. Il se met à hurler :
– Waaaaaaaaaaaaaaaaaaaaargh !
Mélisse sursaute. Elle regarde Jofroi. Il danse d’un pied surl’autre en grimaçant.
La princesse ne claque pas des dents mais ses lèvres tremblent.Bientôt, elle sourit. Puis elle éclate de rire sur son lit.
Dans le couloir, Isidore comprend que la peur bleue n’a pas marché.Demain Mélisse partira à tout jamais.
Quand le roi entre dans la chambre, la princesse court vers lui. Ellele serre dans ses bras et s’écrie :
– Papa, ton idée est géniale. C’est mieux qu’une peur bleue.Jofroi avec les doigts dans le nez, je ne l’oublierai jamais. Jeveux recommencer. Autrement, inutile de me retenir. Je parstravailler au musée du fou rire.
Extrait de Histoires du soir, un livre de Benoît Broyart illustrépar Laurent Richard, en vente dans La Librairie de Benoît :
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Nicolo a le plus petit bateau du port. Le matin, il part pêcher etjette sa ligne à l’eau. Il ramène juste ce qu’il faut. Desdaurades. Des tacauds. Et quand il a de la chance, des solesbrillantes et des rougets colorés. Il pêche quelques poissons pourlui. Quelques poissons pour le marché. Un point c’est tout. Pourrien au monde, Nicolo ne voudrait fatiguer son ami l’océan. Il nefaut pas être trop gourmand.
Quand Nicolo rentre au port, le petit pêcheur passe entre leschalutiers. Il entend Aldo crier du haut de son gros bateau.
– Eh Nicolo, la pêche a été bonne ? Tu ne fais pas lepoids, mon gars ! Le poisson d’or n’est pas pour toi.
Le poisson d’or est un trésor caché au fond de l’océan. Sesyeux sont deux gros diamants. Personne ne sait où il est mais toutle monde aimerait le ramener.
« Poisson d’or pêché, fortune assurée. »
Nicolo regarde souvent le gros chalutier d’Aldo. Après plusieursjours passés en mer, Aldo revient les filets remplis de poissonsénormes. Thon. Cabillaud. Lotte. Il attrape tout ce qu’il peut.Aldo risque d’épuiser l’océan. Il est bien trop gourmand.
Depuis quelques jours, Aldo s’est mis en tête de trouver lepoisson d’or. S’il y parvient, il arrêtera de pêcher. Ilarrêtera de travailler. Au bord d’une grande piscine, il irabronzer. C’est pourquoi Aldo racle les fonds marins en répétant :
– Le poisson d’or, je l’aurai. Le poisson d’or, je l’aurai.
Ce matin, l’océan est en colère. Nicolo sait que la mer en aassez. Assez de se faire voler tous ses poissons. Le petit bateautangue en s’éloignant du port mais Nicolo n’a pas peur du grostemps.
Un peu plus loin, la mer se calme et Nicolo jette sa ligne à l’eau.Au bout de quelques secondes, le fil se tend. Le pêcheur sourit.L’océan a décidé de lui donner un gros poisson. Un très grospoisson. Nicolo tire pour ramener sa prise... C’est le poissond’or !
« Poisson d’or pêché, fortune assurée. »
Nicolo rentre au port. L’océan, calmé, ne fait aucune difficulté.En voyant le petit bateau de Nicolo se faufiler entre les gros, Aldocrie du haut de son gros bateau :
– Eh Nicolo, la pêche a été bonne ?
Le petit pêcheur sourit et répond :
– La pêche n’a jamais été aussi bonne.
Nicolo monte sur le chalutier d’Aldo en serrant le poisson d’orsur sa poitrine.
– J’ai quelque chose pour toi, Aldo.
Il place le poisson d’or entre les mains d’Aldo et lui dit :
– Poisson d’or pêché. Fortune assurée.
Aldo se met à sauter sur le pont de son bateau en criant, sans mêmeun remerciement.
– Je suis riche ! Je suis riche !
Nicolo retourne sur le quai, enchanté. Ça a marché. Aldo nepêchera plus jamais. Le poisson d’or, qu’en aurait-il fait ?Demain, il reprendra la mer pour attraper quelques poissons. Quelquespoissons seulement. Demain, il ira saluer son ami l’océan. Lepetit pêcheur est rassuré. La mer va pouvoir se reposer.
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Alessandro est ravi : il a enfin un nouvel appartement. Et cematin, on lui livre son piano. C’est un des meilleurs musiciens dumonde. Il fait rêver tous les spectateurs grâce à ses mélodies. Le concert est dans un mois. Au travail ! Assis sur sontabouret, le pianiste pose ses mains sur le clavier et se met àjouer.
Mais on sonne à la porte. Le pianiste grogne :
– Qui ose me déranger ?
C’est son voisin du dessus, le veilleur de nuit. Le visage toutfripé, il crie :
– Arrêtez ce raffut ! Je rentre du travail. J’aimeraisdormir en paix.
Le voisin remonte chez lui aussi vite qu’il est descendu.
Le pianiste referme sa porte, en soupirant.
– Du raffut ? Une musique jouée dans le monde entier. ÀParis, New-York, Rome ou New-Delhi. Quel culot !
Tant pis. Alessandro attendra l’après-midi.
L’après-midi arrive enfin. Alessandro pose ses mains sur leclavier. Il ferme les yeux et se met à jouer.
Mais on sonne à la porte. Le pianiste tonne :
– Qui vient m’interrompre, cette fois ?
C’est sa voisine du dessous. Elle porte la petite Lili dans sesbras.
– Vous vous croyez où ? C’est l’heure de la sieste, pourla petite. Impossible de dormir avec tout ce bruit.
La voisine redescend chez elle aussi vite qu’elle est montée.
Le pianiste referme sa porte, les larmes aux yeux.
– Du bruit ? Mais personne ne respecte la musique, ici !
Alessandro pose sa tête sur le clavier et éclate en sanglots.
Le matin, il faut du silence pour le veilleur de nuit. Et en débutd’après-midi, du calme pour Lili. Comment faire ? S’il nejoue pas, il ne sera pas prêt pour son concert.
C’est l’heure du goûter. La sieste de Lili est terminée.Alessandro se remet à jouer. Rien ne pourra l’arrêter. Le son estparfait.
Mais on sonne à la porte. Le pianiste explose :
– Qui puis-je déranger encore ?
C’est sa voisine de palier, une dame âgée. Elle le regarde d’unœil sévère.
– Vous allez arrêter ce tintamarre, oui ? Je n’entends plusmon jeu télévisé. Autrement, j’appelle la police !
La vieille dame repart chez elle aussi vite qu’elle est arrivée.
Le pianiste referme sa porte, désespéré.
– Du tintamarre ? La plus belle musique du monde.
Allongé sur son lit, Alessandro est inconsolable. C’est décidé :il va déménager.
Soudain, Alessandro a une idée. Et s’il invitait ses voisins à larépétition. Il dispose quatre chaises devant le piano et va lestrouver.
Le voisin du dessus descend en bougonnant.
La voisine du dessous monte parce que Lili a insisté.
La vieille dame du palier est curieuse. Elle a envie de visiterl’appartement de son étrange voisin.
Devant son nouveau public, Alessandro prend une grande inspiration etcommence à jouer. Il a été acclamé dans le monde entier maisaujourd’hui, il sait que rien n’est gagné.
La voisine de palier balance bientôt la tête, les yeux fermés.
Lili sourit. Sa maman se met à rêver.
Le veilleur de nuit fronce les sourcils, bien décidé à ne pas selaisser emporter. Mais la musique est si belle qu’il se met àpleurer.
À la fin du concert, tous les voisins applaudissent Alessandro. Lepianiste est enfin soulagé.
Depuis ce jour-là, après le repos du veilleur de nuit, la sieste deLili et le jeu télévisé de la voisine de palier, Alessandro faitses répétitions en public dans son petit salon.
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Valentin fait la grimace. Une promenade, ça ne lui plaît pas. Ilpréfèrerait regarder son dessin animé préféré. Dehors, le cielest gris et la pluie vient juste de s’arrêter. Mais son papainsiste ...
– Valentin, mets tes bottes et ton ciré. Tu verras, la forêt estmagnifique en automne.
… et sa maman insiste aussi…
– On trouvera peut-être des champignons ou des châtaignes. Arrêtede faire cette tête, veux-tu ?
La famille habite depuis trois jours seulement en bordure de laforêt. En quelques enjambées, les voilà arrivés sur un chemin quis’enfonce dans les bois.
Valentin oublie vite la télé. Les feuilles des grands arbres ontcommencé à tomber. Quand il court dedans, ça fait un bruit trèsamusant.
La maman de Valentin lui montre bientôt un arbre du doigt.
– Viens voir, certains de ses fruits sont tombés. Tu sais ce quec’est ?
– Facile. Des marrons. J’adore ça.
– Non, Valentin, ce sont des châtaignes. Regarde, la bogue a despiquants très pointus et il y a plusieurs fruits à l’intérieur.C’est la châtaigne que l’on mange.
– Ah oui.
– Si tu mangeais un marron, tu aurais très mal au ventre.
Cette sortie en forêt est si agréable que personne ne voit le tempspasser. La nuit sera bientôt là. Il est l’heure de rentrer.
Mais au moment de faire demi-tour, petit problème. Les adultessemblent perdus. En tout cas, ils sont plutôt inquiets.
Le papa de Valentin chuchote pour que son fils n’entende pas...
– Je ne suis plus très sûr de moi, en fait. Je prendrais bien àgauche mais je peux me tromper.
…et sa maman lui répond à voix basse.
– Mais c’est toi qui devais t’occuper de l’itinéraire. Dansune demi-heure, il fera nuit. On n’a même pas de lampe-torche. Tusais que j’ai peur du noir, en plus !
Valentin est intrigué.
– Pourquoi vous vous parlez à l’oreille ? C’est unsecret ? Et quand est-ce qu’on rentre ? J’ai faim, moi.
Les adultes ont l’air embarrassé mais Papa rassure Valentin.
– Ne t’inquiète pas. On va prendre par ici et on sera chez nousdans moins d’un quart d’heure.
Valentin entend sa maman soupirer. La nuit arrive. Ils sont au milieude la forêt. Ce n’est pas normal. C’est même inquiétant.
– Tu es sûr que c’est par là, Papa ?
Soudain, un bruit grave et très puissant retentit. La maman deValentin pousse un grand cri. Elle se serre contre son mari qui n’apas l’air plus rassuré qu’elle.
– Mais qu’est-ce que c’est ? Ce cri horrible, là…
Valentin regarde ses parents, étonné. Il a sursauté mais il aaussi reconnu ce bruit impressionnant.
– Ne t’inquiète pas, Maman. C’est juste le brame du cerf.
– Le brame du cerf ?
– Ben oui. C’est la maîtresse qui nous l’a expliqué. Il nefaut pas avoir peur. Il appelle les biches pour leur dire qu’il lesaime !
Les parents de Valentin sont étonnés d’entendre l’explicationsortir de la bouche de leur garçon. Et ce n’est pas fini carValentin vient aussi de retrouver le bon chemin !
– Regarde maman, je reconnais le châtaignier. Tout droitmaintenant. C’est le sentier qu’on a pris en venant.
Les adultes ont enfin de nouveau leur sourire.
Le papa de Valentin est très fier de son garçon…
– Eh bien, mieux vaut emporter son Valentin en forêt qu’unelampe-torche. Ce petit garçon a un très bon sens de l’orientation !
… et sa maman aussi :
– Oui, c’est sûr. Pour te remercier, mon petit chéri adoré, cesera châtaigne grillée dans la cheminée, ce soir. Tu en pensesquoi ?
– Je pense qu’on va bien se régaler tous les trois !
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Emmitouflé dans sa capuche, bien au chaud sur le traîneau, Nanoukregarde défiler le paysage blanc en souriant. Nanouk va pêcher avecson papa. Ca fait des mois qu’il attend ça. Des mois qu’ilrépète : « Je suis assez grand pour venir avec toi. »Nanouk sera le grand garçon que son papa espère. Un garçon capablede manier l’hameçon.
Le traîneau s’arrête bientôt.
– Aide-moi, Nanouk. Si nous voulons ramener du poisson, il n’y apas de temps à perdre !
Avec son papa, Nanouk sort le matériel et prépare les lignes.
– Maintenant mon fils, on va attendre que les poissons mordent àl’hameçon.
Attendre, Nanouk déteste ça. Pendant que son papa surveille leslignes, il regarde la banquise.
Là-bas, on dirait que la glace a bougé. Nanouk se lève pour voirplus loin. Il aperçoit alors une grosse forme blanche quis’approche. Aucun doute, c’est un ours. Nanouk est impressionnémais il n’a pas peur. Un animal sauvage n’est pas méchant. Sil’ours continue à avancer, il les aura bientôt rejoints. Nanouktape sur l’épaule de son papa, ravi.
– Je crois que nous avons de la visite.
Le papa de Nanouk se relève brusquement, inquiet.
– Nous n’allons pas rester. C’est trop dangereux. Même sil’ours préfère les phoques, il mange des poissons aussi. Et à lapêche, un concurrent de cette taille, je n’en veux pas. Je nefais pas le poids.
Le papa de Nanouk range ses lignes. Mais au moment de repartir, c’estla catastrophe. L’avant du traîneau s’est pris dans la glace.Avec une petite pioche, le papa de Nanouk tente de dégager au plusvite le traîneau. Il sait que le danger n’est pas loin.
– Reste à côté de moi, mon garçon.
Nanouk ouvre les yeux en grand. La bête est à vingt mètres, pasplus. L’ours est énorme. Sa fourrure est magnifique. Nanoukvoudrait s’approcher pour le caresser mais il sait que c’estimpossible. C’est un ours. Un vrai. Pas une grosse peluche. Plusque dix mètres. L’animal est tout près.
Sur la banquise, les deux poissons pêchés ont été oubliés. Lepapa de Nanouk, trop pressé, ne les a pas ramassés. C’estl’occasion rêvée de faire un cadeau à l’ours blanc.
Nanouk saisit l’un des poissons par la queue et l’envoie versl’animal en criant :
– Tiens, mange-le si tu as faim.
L’ours blanc avale le poisson et le papa de Nanouk se retourne,fâché :
– Tu veux qu’on se fasse croquer ? Qu’est-ce que tu fais !
– J’envoie un poisson à mon ami.
– Tu ne pouvais pas faire mieux pour l’attirer. Tiens-toitranquille. Nous allons pouvoir partir, j’ai presque fini.
Nanouk n’a pas envie de désobéir mais il reste un poisson sur labanquise… et il a une idée pour que son papa ne soit plus fâché.Il attrape discrètement le dernier poisson et le jette le plus loinpossible dans l’eau.
On entend un gros plouf ! et le papa de Nanouk sursaute. L’oursblanc a plongé sans hésiter. C’est un bon nageur, l’eau ne luifait pas peur.
Heureusement, après avoir englouti le poisson, l’animal ne revientpas dans leur direction. Un peu plus loin, sur un morceau debanquise, des phoques se prélassent. Et pour le grand chasseurqu’est l’ours blanc, les phoques sont plus intéressants que lespoissons.
Les pêcheurs sont repartis. Emmitouflé dans sa capuche, bien auchaud sur le traîneau, Nanouk regarde défiler le paysage blanc ensouriant. Son papa ne le grondera pas. Nanouk les a mis hors dedanger grâce au poisson qu’il a jeté dans l’eau. Les pêcheurssont bredouilles mais Nanouk est très courageux. Il est bien legrand garçon que son père espérait.
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Un loup est passé près de chez nous. Il a laissé des traces depatte dans la neige. Ce n’est pas étonnant, le village est toutprès de la forêt.
Dans le Vercors où j’habite, les loups gris sont revenus depuisquelques années. Je suis sûre qu’ils aiment ces bois autant quemoi. C’est pour ça qu’ils sont là.
Mais ce soir, c’est bizarre, les adultes n’ont pas l’aircontent. Je crois qu’ils ont peur du loup. Comme les enfants dansles histoires. Alors que moi, je rêverais d’en voir un en vrai.
Ce soir, autour de la table, Marc, le maire du village, essaie derassurer René le berger, qui a peur pour son troupeau. Ma maîtresse,Louise, qui est aussi une amie de maman, est venue car elle connaîtbien les animaux sauvages. Bien sûr, mes parents m’ont envoyée mecoucher, mais je me suis cachée pour écouter. En haut del’escalier, c’est parfait.
– Un loup, c’est dangereux pour la population lance Marc. Ilfaut trouver une solution.
– Voyons Marc, la population ne court aucun danger. Les loupsn’attaquent jamais l’homme répond ma maîtresse Louise.
– On voit que tu n’as pas de brebis ! rétorque René,énervé. Je n’ai pas envie que ce loup décime mon troupeau.
– René, le loup et l’agneau, c’est dans les fables de LaFontaine reprend Louise. Le loup se nourrit surtout de bêtesaffaiblies qu’il trouve dans la forêt.
Marc se remet à parler. Et quand je l’entends, cette fois, unegrosse colère monte en moi.
– On pourrait organiser une battue pour le supprimer. Çarésoudrait le problème…
Tuer le loup ? Non mais les adultes sont devenus fous. Jedescends l’escalier en courant. Papa me fait les gros yeux mais çan’a pas d’importance.
– Tuer le loup ? Mon animal préféré ! Non mais vousêtes tombés sur la tête ? Il y a longtemps, il y avait bienplus de loups par ici. Et plein de brebis aussi. Si Papy étaitencore là, il vous l’aurait dit.
Louise me regarde en souriant et ajoute :
– Tu as raison, Zoé. Et tout le monde cohabitait. Mais je croisqu’aujourd’hui, la plupart des grands sont fâchés avec lesanimaux sauvages. Ils ont peur du loup. Comme les enfants dans leshistoires. C’est bizarre.
Les adultes me regardent, l’air gêné. Heureusement, Maman serange rapidement de mon côté.
– Je crois que vous devriez écouter la petite. René, tu sais, ilexiste des solutions pour protéger tes brebis. D’ailleurs, tonchien Tommy suffit, à mon avis.
Au bout d’un long moment de silence, Marc reprend la parole :
– Louise, tu connais mieux cet animal que moi. Et Zoé aussiapparemment, me dit-il en souriant. Voilà ce que je vous propose.René, nous ferons garder la bergerie. On va se relayer et onlaissera ton chien avec les brebis jour et nuit. Comme ça, tudormiras tranquille. Et d’ici quelques jours, le loup rejoindra laforêt où il habite habituellement. Ici, il ne fait que passer. S’iln’est pas dangereux pour l’homme, je ne vois aucune raison de lesupprimer.
Ouf ! Je suis soulagée. Après une tournée de bisous que lesadultes ont bien mérités, me voilà revenue dans ma chambre. J’ailes yeux qui piquent. Je suis fatiguée. Mais avant de m’endormir,je ne peux pas m’empêcher de regarder une dernière fois par lafenêtre. Au cas où le loup passerait.
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J’ai du mal à ouvrir les yeux ce matin. Six heures, c’est tôtpour se lever quand on est en vacances.
– Dépêche-toi, mon garçon, dit mamy. Si tu veux visiter lacriée, il est temps d’y aller.
Mamy me dit toujours oui. Ou presque. Surtout quand je souris. Alorsj’en profite un peu.
– On peut emmener Lilo ?
Lilo, c’est mon chiot. Il est rigolo. Dès qu’il me voit, ilremue la queue et me fait des léchouilles. J’adore ça. Je voisbien que mamy préférerait qu’il nous attende à la maison. Alorsje souris…
…Et juste après, nous marchons tous les trois, mamy, Lilo et moi.Direction, la criée.
– Voilà, c’est là dit mamy.
La criée, je voyais ça plus joli. C’est juste un bâtiment avecplein de gens dedans. J’aurais préféré rester au lit.
– Tu attaches la laisse de Lilo au poteau. Il nous attendra. Tu asvu l’autocollant sur la porte. Interdit aux chiens.
J’ai beau sourire, cette fois mamy ne change pas d’avis. Jecaresse mon chiot pour le rassurer avant de le laisser seul.
– Lilo, tu restes ici. Je reviens vite, c’est promis.
On entre avec mamy. Il y a des messieurs qui crient, des carnets àla main, et des caisses remplies de poissons partout sur le sol.
– Tu vois, mon garçon, les bateaux viennent de rentrer aprèsplusieurs jours en mer. Ce sont les poissons qu’ils ont rapportés.Ici, les poissonniers et les cuisiniers font leur marché. Dans cettecaisse, il y a des rougets, là-bas des tacauds et par-là, desdaurades.
Un peu plus loin, j’aperçois des poissons plats avec une tête detravers.
– Ceux-là, c’est quoi ?
– Des soles. C’est délicieux, à la poêle. Je t’en ferai cemidi, si tu veux.
Le poisson, je n’aime pas trop. Et puis j’ai hâte que la visitese termine. Hâte de retrouver Lilo. Dès qu’il me voit, mon chiotremue la queue et me fait des léchouilles. J’adore ça.
Dans une autre caisse, je vois de petites bêtes remuer. Elles ontdes pinces.
– Ce sont des bébés homards, mamie ?
– Non, mon garçon. Des langoustines. Une fois cuites aucourt-bouillon, on les laisse refroidir et on se régale.
Je continue de regarder les bestioles, intrigué. C’est rigolo.
Quand soudain, à l’autre bout du bâtiment, j’entends unmonsieur hurler.
– Mais arrêtez-le voyons, arrêtez-le !
Je regarde mamy, étonné. Bientôt, plusieurs messieurs courent detous les côtés. Je vois des caisses renversées et j’entends dubruit.
– Ne le laissez pas s’échapper, ajoute un autre monsieur !
Je finis par comprendre. Et mamy en même temps que moi. Une petiteboule de poil arrive droit sur nous. Dès que Lilo me voit, il remuela queue et me saute dans les bras. Il sent très fort le maquereauet une queue de poisson dépasse de sa gueule.
Dans le bâtiment, c’est le silence complet. Un monsieur tout rouges’approche de moi, l’air très fâché. Je ne souris pas. Je saisque ça ne marchera pas. Il regarde mamy, l’air en colère.
– Il est à vous, ce chien ?
Mamy s’excuse pour nous trois et le monsieur se calme enfin. Ellepromet aussi qu’elle paiera les poissons sur lesquels Lilo a poséses crocs.
Une minute plus tard, nous voilà revenus sur le trottoir. Je metourne vers mamy et lui lance un sourire. J’espère qu’elle ne megrondera pas.
– Désolé, mamy. Tu avais raison. Lilo aurait dû attendre à lamaison. Si tu veux, je te rendrai l’argent que tu as donné aumonsieur. J’ai des sous dans ma tirelire, tu sais.
Mamy soupire et finit heureusement par me sourire. Soulagé, je luisouris aussi.
– Garde tes sous, mon garçon. Lilo est jeune encore. C’estnormal qu’il fasse des bêtises. Mais ton chiot est vraiment undrôle de zèbre. Un chat, je ne dis pas… mais c’est bien lapremière fois que je vois un chien manger tout cru un maquereau.
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Mon Papa est un aventurier, un photographe animalier spécialiste despays froids. J’ai beaucoup de chance, je sais. Cette fois, il m’aemmené avec lui pour sa nouvelle expédition. Bientôt, nous verronsdes manchots-empereurs. En vrai. De près. Enfin, pas trop près nonplus ; il ne faut pas les effrayer, juste les photographier.
Dans la cabine du bateau, je suis réveillée avant que Papa vienneme chercher. Quand il entre dans ma chambre minuscule, je suis déjàdebout en train de m’habiller : collants, tee-shirt spécialfroid, polaire, anorak… En Antarctique, même quand c’est l’été,on a intérêt à se couvrir. Autrement, on risque de geler. Par -40°C, il faut se protéger.
– Tu viens, Jeanne ?
J’ai vite avalé mon petit déjeuner. Sur le pont, j’aperçois lacolonie de manchots. C’est incroyable. Combien sont-ils ? Descentaines, des milliers. Ils font beaucoup de bruit en tout cas. Quepeuvent-ils bien se raconter ?
– Regarde comme ils sont beaux. Et ce sont les plus grands desmanchots. Ils font à peu près la même taille que toi.
Quand j’entends Papa dire ça, j’ai un peu peur. Je sais qu’ilssont inoffensifs, mais rencontrer des animaux chez eux, c’estimpressionnant.
Cinq minutes plus tard, nous marchons sur la glace, à quelquesdizaines de mètres des oiseaux. Pendant qu’il installe sesappareils photo, Papa me parle de son animal préféré. Lemanchot-empereur, il le connaît par cœur.
– Tu vois Jeanne, les poussins ont une tête noire et deux tachesblanches autour des yeux. Et chez le manchot, les parents s’occupenttous les deux du poussin.
– Tu m’avais déjà dit que le papa couvait l’œuf pendant quela maman partait pêcher, mais je ne savais pas qu’une fois lepoussin arrivé, ils s’occupaient tous les deux du bébé !
– Eh bien si. Les parents se relaient à tour de rôle pour luidonner à manger, figure-toi.
Il en a de la chance, ce poussin. Ses deux parents s’occupent delui quand il est tout petit.
– Tu sais ce qu’il a d’étonnant, aussi ? Avant que lepapa et la maman fassent connaissance, ils s’échangent descourbettes et chantent pour se séduire. Et quand ils se sontchoisis, ils se retrouvent ensuite sur l’immense banquise grâce àleurs cris !
Papa continue de parler. C’est normal, le manchot-empereur est sonanimal préféré. Une fois qu’il est parti sur ce sujet, on nepeut plus l’arrêter. Mais bientôt, je n’entends plus sa voix.De grands bruits résonnent autour de nous. Schbrouf, plouch,shiouf ! Une ribambelle de manchots sort de l’eau. Ilsprennent leur élan et glissent longtemps sur le ventre. Ils prennentla banquise pour un grand toboggan.
– Ma petite Jeanne, je crois que tu ne m’écoutes plus… Et situ faisais des photos, toi aussi, ça te dirait ?
Quelques secondes plus tard, me voilà derrière un de ses appareils,l’œil dans le viseur. J’appuie sur le bouton. C’est moi lapetite photographe animalière !
Papa range bientôt son matériel et nous retournons sur le bateau.On va pouvoir se mettre au chaud. Mais juste avant de rentrer…schbrouf, plouch, shiouf ! Papa trébuche et glisse sur le pontgelé. Il ne s’est pas fait mal, heureusement. Je repense auxmanchots et j’ai envie de rigoler. Une fois remis sur ses pieds,papa se tourne vers moi, un grand sourire aux lèvres.
– Apparemment, connaître les manchots-empereurs par cœur, cen’est pas suffisant pour savoir imiter leur glissade. Je crois quej’ai encore des progrès à faire, Jeanne.
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Lili n’aime pas la montagne. Et surtout, elle déteste lesrandonnées. Pour les vacances d’été, elle voulait aller à lamer. Mais on ne l’a pas écoutée, bien sûr. Alors ce matin, aumoment de mettre ses chaussures, elle traîne les pieds.
– Dépêche-toi, Lili. C’est le matin que la montagne est la plusjolie. Et arrête de faire cette tête, veux-tu ?!
– Je n’ai pas envie de marcher.
Derrière le chalet, le chemin étroit monte en tournant. Il tourne,tourne, c’est fatigant. Et comme Lili n’a pas envie de grimper,elle traîne les pieds. Son papa ralentit souvent pour l’attendreet lui montrer de jolies fleurs ou des paysages grandioses.
– Tu vois, là haut, on aperçoit même le Mont Blanc.
– Mouais.
Un peu plus loin, le papa de Lili s’arrête et pose son sac.
– Tu seras peut-être plus motivée après une barre de céréales.Je crois que tu as besoin d’énergie, ma chérie.
Pour la première fois de la journée, Lili sourit. Assise dansl’herbe, au soleil, elle se sent bien. Elle avait faim. Pendant queson papa regarde la carte, elle prend les jumelles dans le sac. Oh !Mais ça remue là-bas !
Au pied d’un gros rocher, une famille de marmottes sort en effet deson terrier. Un, deux, trois, quatre, cinq, les petits pointent leursnez. Lili ne dit rien. Elle ne bouge plus. Elle regarde, en souriant.
Dressée sur ses pattes arrière, la maman marmotte surveille lesalentours. Pendant ce temps, les marmottons chahutent. Ils courent,jouent avec des petits cailloux, se chamaillent. Lili voit aussi lamaman grignoter une fleur de pissenlit. Un vrai régal, apparemment.
Finalement, la montagne c’est joli ! Oui, mais Lili n’aimepas la randonnée. Marcher, ça fait mal aux pieds. Et la voilà quirecommence à bouder.
Son papa était parti remplir sa gourde au ruisseau qui serpente, unpeu plus bas. De retour, il s’assoit à côté de Lili.
– Alors, ma chérie, tu as vu quelque chose ?
La montagne, ça résonne, et la voix grave de papa est arrivéejusqu’au terrier. En un instant, les marmottes sont rentrées secacher. Décidément, ce papa est très fort pour tout gâcher.
– C’est malin, tu as fait peur aux marmottes. Et puis… j’aiencore faim.
Le papa de Lili ne sait plus quoi faire. Il aurait aimé continuer larandonnée, mais si c’est pour supporter la soupe à la grimace desa Lili préférée, mieux vaut rentrer.
Le chemin étroit descend en tournant. Il tourne, tourne, mais Liline traîne plus les pieds. Lili a arrêté de bouder. Elle estpressée.
À peine arrivée au chalet, Lili file dans le jardin. Elle cueilletoutes les fleurs de pissenlits du terrain et fait un gros bouquetqu’elle dépose près de la clôture, dans un coin un peu caché.Avec de la chance, ses amies viendront le grignoter. Lili n’aimepas trop marcher mais sait observer. Et tout à l’heure, elle abien vu la marmotte se régaler.
Un plat de pissenlits aussi copieux, aussi joli que celui-là, quandon est une marmotte, ça ne se refuse pas.
Extrait de Histoires du soir, un livre de Benoît Broyart illustré par Laurent Richard, en vente dans La Librairie de Benoît :
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Quand Fatou se réveille, le soleil est déjà haut. Il est tempsd’aller jouer. Mais sa maman la retient. Ce matin, il y a unproblème au village. Un problème de taille. Un problème de lataille d’un lion.
– Reste là, ma fille. Un vieux lion s’est installé au milieudes cases. Tu n’iras pas jouer dehors aujourd’hui. C’est tropdangereux.
Fatou se précipite à la fenêtre et découvre l’animal. La bêteest allongée. Elle ne dort pas. Elle a les yeux ouverts et regardeautour d’elle. Fatou n’a jamais vu un lion d’aussi près.Pourtant, elle aimerait s’approcher encore, mais c’est tropdangereux.
Tout le monde s’est réuni dans la case d’à côté pour trouverune solution et la maman de Fatou s’apprête à rejoindre lesautres.
Fatou regarde par la fenêtre. Le lion ne bouge pas. Elle aperçoitla large tête couronnée. Il est magnifique. La bouche ouverte,l’animal tire la langue et halète. Il est peut-être malade oufatigué.
– Viens, ma fille. Je t’emmène avec moi.
Quelques minutes plus tard, dans la case d’à côté, le chef parlele premier.
– D’habitude, les lions restent dans la savane. Ils vivent entroupe. Un lion solitaire, ça n’existe pas. Mais garder une bêtesauvage près des habitations, c’est hors de question !
Un des villageois prend alors la parole.
– Si ce lion a faim, il risque de nous dévorer. Il faudrait unchasseur pour s’en occuper. Je vais aller chercher ma lance et vousen débarrasser.
Fatou aimerait parler mais elle se tait. Tuer ce lion qui n’a rienfait, quelle drôle d’idée !
Heureusement, le chef intervient.
– Le chasser, j’y suis opposé. Sa présence signifie quelquechose. Le roi des animaux n’est pas là par hasard. Bien sûr, ilne peut pas rester, mais un grand malheur s’abattra sur nous sinous lui faisons du mal. Alors comment faire ? Lui parler ?Impossible. L’adopter ? Encore moins. Il faut trouver uneautre solution.
Fatou soupire. Les adultes ne comprennent rien. Ils sont tropcompliqués. Elle se demande si ce lion n’aurait pas soif, mais unesoif énorme, comme Fatou quand elle a trop joué. Une soif quil’empêcherait de bouger.
Pendant que les grands continuent de discuter, Fatou sort de la casesur la pointe des pieds. Elle va chercher une petite calebasseremplie d’eau. Lentement, elle s’approche du lion. Elle n’en ajamais vu d’aussi près. Elle n’en a jamais vu d’aussi gros.Fatou aime les animaux. Elle n’a pas peur mais elle estimpressionnée. Son cœur bat vite. Elle dépose la calebasse devantle lion. L’animal relève la tête. Il a les yeux presque fermés,l’air très fatigué. Fatou recule et l’observe. Bientôt, ellesourit. Le lion s’est mis à boire. Sa langue prend toute la placedans la calebasse.
Fatou rejoint les adultes sur la pointe des pieds. Personne n’avaitremarqué son absence. Elle s’approche alors de la fenêtre et voitque le lion s’est relevé. Il est en train de s’éloigner. Fatouavait raison, c’était la soif qui empêchait ce vieux lion debouger. Mais une soif énorme, comme Fatou quand elle a trop joué.Dès que les grands auront fini de palabrer, ils pourront laféliciter.
Extrait de Histoires du soir, un livre de Benoît Broyart illustré par Laurent Richard, en vente dans La Librairie de Benoît : https://www.lalibrairiedebenoit.fr/shop/histoires-du-soir-201
Quand Augustin est descendu ce matin, il a trouvé le panier vide.Bidule et sa famille ont disparu ! Comme c’est bizarre. Avecsa loupe, le détective cherche des indices. Des poils. Des traces depattes. Il sait que de petits détails pourraient le mener sur unepiste. Mais là, rien. Bidule a pourtant donné naissance à cinqchatons trois jours auparavant, ils n’ont pas pu s’envoler !
Le nez dans le panier vide, sa loupe en main, Augustin réfléchit.Il a bien l’intention d’éclaircir ce mystère, mais maman neveut pas l’aider :
– Mon chéri, viens déjeuner. Bidule est sans doute parties’installer dans un autre coin de la maison pour être plustranquille.
– Comment ça, plus tranquille ?
– Eh bien oui, tu t’en occupes toute la journée, mais ils n’ontpeut-être pas envie d’être soulevés, caressés, câlinés…Leur maman a dû les transporter pour les protéger.
Augustin ne répond rien, mais il n’est pas du même avis. Etapparemment, sa maman ne se rend pas compte de l’urgence de lasituation. Vite, il faut retrouver Bidule et les chatons. Le déjeunerattendra. Un suspect, Augustin en connaît un. Le coupable,c’est sûrement papa. Il n’aime pas les chats.
Doucement, le jeune détective entre dans la chambre de ses parents.C’est dimanche, les volets sont fermés et le suspect est endormi.Une voix pleine de sommeil sort du lit :
– Qu’est-ce que tu veux, mon chéri ?
Augustin regarde son papa avec un air méfiant. Pas étonnant qu’ilsoit encore fatigué, il a dû agir pendant la nuit.
– Bidule et ses petits ont disparu. Tu ne les aurais pas vus ?
– Qu’est-ce que tu racontes, Augustin ? Laisse-moi dormirencore un peu, veux-tu ?
Cette réponse n’est pas satisfaisante pour un détective de latrempe d’Augustin. Il veut réveiller le coupablepour le faire parler quand il entend un drôle de bruit un peu plusloin sur le palier. Ça vient de la chambre d’Anna. Augustin auraitdû y penser avant. Bien sûr, sa grande sœur a installé Bidule etses chatons dans sa chambre pour en profiter toute seule. Ça ne vapas se passer comme ça !
– Dis, tu n’aurais pas caché Bidule et ses chatons dans tachambre, par hasard ? Je les cherche partout depuis ce matin, ditAugustin en regardant dans tous les coins.
Anna regarde son frère en souriant. Augustin en est certain, il estsur la bonne piste. Sa sœur sait quelque chose.
– Si je te dis où Bidule s’est réfugiée, tu me prometsd’arrêter d’être tout le temps sur son dos ?
– Qu’est-ce que tu racontes ? Depuis que les chatons sontnés, je m’en suis bien occupé.
– Un peu trop bien... Bidule a besoin de calme, tu sais. Elle atransporté ses petits hier soir, tu étais déjà dans ton lit. Situ ne me crois pas, suis-moi.
Augustin découvre bientôt Bidule et ses chatons installés sur untas de pulls, dans le fond du dressing. Toute la famille ronronne,les yeux fermés. Un chaton gris est en train de téter, un autre,blanc et noir, joue à marcher sur ses frères et sœurs, une toutepetite chatte grise s’étire et baille tandis que deux jumeauxcouleur écaille de tortue dorment l’un sur l’autre.
- Ouf, ils sont tous là, ça va… soupire Augustin.
Augustin le reconnaît, Anna a dit la vérité. Les chatons, mieuxvaut les regarder que les soulever, caresser, câliner… Autrement,ils risquent de déménager !
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Quand les grands invitent leurs amis à un barbecue, blablabli etblablabla, les discussions n’en finissent pas ! Et les enfantss’ennuient.
Le petit frère d’Auguste s’est déjà échappé. Depuis qu’ilmarche, Maël court partout. Il court tout le temps. Auguste selève à son tour. Il reviendra pour le dessert. Mais où est Maël ?
Auguste trouve son petit frère penché au-dessus du tas de compost,immobile. Qu’est-il en train de regarder ?
La tête plongée dans les épluchures, un hérisson cherche àmanger. Scritch scritch scritch. Le petit animal gratte, farfouille,retourne. Gronk gronk gronk. Il fait aussi de drôles de bruits avecsa bouche. Maël recule. Il a un peu peur.
– Ne t’inquiète pas, petit frère. C’est juste un hérisson.Il cherche des insectes pour les croquer.
Maël regarde Auguste, rassuré. Juste après, il veut caresserl’animal et tend la main vers lui. Son grand-frère l’arrête.
– Attention, ce n’est pas un chat ! Si tu lui fais peur, ilva se mettre en boule et ses épines piquent très fort.
Maël regarde Auguste, déçu. Et même… un peu plus. Si songrand-frère ne trouve pas une idée dans la seconde, Maël éclateraen sanglot.
D’ailleurs, c’est beaucoup moins rigolo. Le hérisson a arrêtéde faire du bruit, il ne mange plus. Le petit animal semble hésiterentre prendre la fuite ou se mettre en boule.
– J’ai une idée, Maël. Et si on lui construisait une cabane,juste à côté ? Comme ça, il pourrait faire la sieste aprèsson repas.
Maël sourit et suit son frère jusqu’à la remise.
– Cette vieille cagette fera l’affaire.
Pendant que les deux garçons préparent un abri pour le hérisson,le bruit recommence sur le tas de compost. La tête plongée dans lesépluchures, le hérisson cherche à manger. Scritch scritch scritch.Le petit animal gratte, farfouille, retourne et fait de drôles debruits avec sa bouche. Gronk gronk gronk.
– Tu vois Maël, on pose la cagette à l’envers. On met un peu defeuilles mortes à l’intérieur de la petite maison et hop, lehérisson viendra peut-être dormir ici quand il aura fini sondessert.
Justement, voilà Papa qui vient chercher ses deux garçons pour ledessert. Il les trouve à côté du tas de compost, occupés à finirla cabane de leur nouvel ami.
– Les garçons, la tarte aux pommes est arrivée. Vous venez ?
Auguste lève la tête. Il sourit, excité à l’idée d’expliquerleur jolie découverte. Un hérisson, on n’en croise pas tous lesjours ! Mais papa a un air sévère.
On n’entend plus aucun bruit sur le tas de compost. Le hérissonest parti. Et le problème, c’est qu’il a laissé un granddésordre autour de lui. Il y a des épluchures partout. Il a mangécomme un petit cochon.
– Auguste, Maël, je vous ai dit cent fois qu’on ne jouait passur le tas de compost.
– C’est pas nous, papa. C’est le hérisson qui est venu mangerlà. Il a farfouillé partout. Un vrai petit cochon.
– Un hérisson. Ah oui ! Et où ça ?